Champignon du mois – Janvier 2020

Janvier 2020


Le genre Scedosporium

REGNE : Fungi
PHYLUM : Dikarya, Ascomycota, Pezizomycotina
CLASSE : Sordariomycètes
ORDRE : Microascales
FAMILLE : Microascaceae

Depuis 2018, 10 espèces sont reconnues dans le genre Scedosporium, avec des fréquences très variables dans l’environnement (certaines espèces comme Scedosporium cereisporum n’étant connues que par un petit nombre de souches), mais aussi des sensibilités aux antifongiques et des répercussions cliniques variables.

Il s’agit de champignons telluriques habituellement saprophytes, dont l’habitat est fortement impacté par les activités humaines (terrains agricoles, parcs et aires de jeux en milieu urbain, vase d’estuaires, boues de stations d’épuration, …), en lien avec leur capacité à utiliser les hydrocarbures aliphatiques ou aromatiques comme sources de carbone et d’énergie.

Ces champignons peuvent déterminer chez l’homme des infections résultant d’une inoculation traumatique d’éléments fongiques (mycétomes sous-cutanés, infections osseuses ou articulaires, …), ainsi que des mycoses résultant vraisemblablement de l’inhalation de spores aéroportées (sinusites, mycétomes pulmonaires …). De plus, ils connaissent depuis le début du siècle un regain d’intérêt compte tenu de leur reconnaissance comme agents d’infections respiratoires chez les patients atteints de mucoviscidose, et d’infections disséminées sévères en cas d’immunodépression (transplantation pulmonaire ou cœur-poumons notamment).

Scedosporium apiospermum IHEM 14462 : Culture sur gélose de Sabouraud (7 jours, 37°C)
Scedosporium apiospermum IHEM 14462 : Morphologie microscopique habituelle. Les spores unicellulaires, ovales ou claviformes, sont produites sur les filaments végétatifs septés, hyalins, à l’extrémité de courtes ramifications cylindriques.
Scedosporium apiospermum IHEM 14462 : stade Graphium, caractérisé par la production des spores à l’extrémité de conidiophores disposés parallèlement les uns aux autres (corémies).

Sur un plan mycologique, ces champignons produisent classiquement des colonies cotonneuses de couleur grise à maturité, avec un verso souvent foncé à noir. Microscopiquement on observe des spores unicellulaires, ovales ou claviformes, hyalines à brunes, insérées à l’extrémité des filaments végétatifs ou de courtes ramifications cylindriques, plus rarement sessiles. Certains isolats, notamment en primoculture à partir d’un prélèvement de terre, peuvent produire un stade Graphium, caractérisé par des corémies, avec des conidiophores disposées parallèlement les uns aux autres et terminés par des annellides produisant des spores unicellulaires, lisses, hyalines et cylindriques. Plus rarement, un stade Pseudallescheria peut être observé, issu de la reproduction sexuée, avec des cléistothèces renfermant des asques à paroi fugace et des ascospores unicellulaires, rondes et brunes. A noter que la différenciation des espèces est quasiment impossible sur le seul examen morphologique ; l’identification précise repose sur le séquençage du locus TUB (gène codant la bêta-tubuline), les bases de données de spectrométrie de masse de type MALDI-TOF ne comprenant pour ce genre qu’un nombre très limité d’espèces.

La disponibilité récente de la séquence complète du génome des espèces les plus fréquentes en mycologie médicale (Scedosporium apiospermum, Scedosporium aurantiacum et Scedosporium boydii) permet d’envisager des progrès dans la compréhension des mécanismes pathogéniques de ces champignons très peu sensibles aux antifongiques actuels, et l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques, et différents travaux sont en cours sur la dégradation enzymatique des radicaux oxygénés, la synthèse de la mélanine, ou encore l’acquisition du fer extracellulaire.

Pour plus d’informations, consulter la revue :
Bouchara JP, Le Govic Y, Kabbara S, Cimon B, Zouhair R, Hamze M, Papon N, Nevez G. Advances in understanding and managing Scedosporium respiratory infections in patients with cystic fibrosis. Expert Rev Respir Med. 2019 Dec 23:1-15. doi: 10.1080/17476348.2020.1705787.

Jean-Philippe Bouchara et Nicolas Papon
(Groupe d’Etude des Interactions Hôte-pathogène – EA 3142, Université d’Angers, Université de Bretagne Occidentale, Angers)

 

Voir le champignon de février

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